Le trajet de la flamme s'est transformé en chemin de la honte
Le trajet de la flamme s'est transformé en chemin de la honte
Le mot qui revient le plus souvent dans la presse internationale, mardi 8 avril,
pour décrire l'étape parisienne de la flamme olympique est chaos.
Et déjà, le terme s'applique pour décrire ce qui attend
les organisateurs à San Francisco, prochaine étape d'un voyage
planétaire déjà remis en cause. Un jour après
Londres, l'étape de Paris a fini dans le chaos, la farce et, finalement,
l'annulation
, estime The Independent. La flamme a été
transportée honteusement à travers les rues de la Ville Lumière
dans un bus de la police (…). Au lieu de célébrer l'émergence
de la Chine comme un pouvoir mondial, le trajet de la flamme s'est transformé
en chemin de la honte
, poursuit le journal, arrivant à la conclusion
que l'on est témoin des plus importantes manifestations internationales
contre les violations des droits de l'homme chinoises depuis les massacres étudiants
à Tiananmen
.
Paris est devenue une scène de désordre"
constate
simplement le New York Times, notant que les manifestants étaient
en particulier composés de personnes déjà présentes
lors de l'étape londonienne, qui ont fait le trajet en Eurostar, dimanche,
et de Belges et Néerlandais ayant effectué le déplacement
en bus. Pour El Pais, Paris a éteint la flamme
,
et ces événements sont un sérieux avertissement à
Pékin : si vous voulez que vos Jeux se déroulent normalement,
vous devez lâcher du lest au Tibet
. On peut regretter une forme
de prise en otage de cette fête du sport
, écrit pour sa part Le Temps,
qui rejette finalement la faute de ce pataquès sur les dirigeants chinois et les pontes du CIO.
LE MYSTÈRE DES HOMMES EN BLEU
La police française est aussi mise en cause. Le correspondant du Temps a pu écouter une conversation radio entre CRS dont le contenu est révélateur
: A l'approche de la flamme, la radio d'un CRS crachote un message éloquent
: Apparemment, ils sont débordés. L'un de ses collègues
critique les organisateurs de la cérémonie : Le parcours
est beaucoup trop long, c'est très difficile à protéger
.
Mais ce sont surtout les hommes en bleu, ces joggeurs censés
protégés la flamme, qui ont attiré l'attention. On ne sait
quasiment rien de ce groupe particulièrement zélé
de gardiens chinois
, constate avec surprise The Independent,
alors qu'à Londres ils n'ont pas hésité à en venir
aux mains avec les athlètes, les manifestants, les journalistes
et même la police
. Officiellement placés sous l'autorité
du Comité d'organisation des JO de Pékin (Bocog), les joggeurs se sont notamment attiré les foudres du président du Comité
olympique britannique, Lord Coe, qui les a qualifiés de brutes et a estimé que ses collègues français devraient se
débarrasser d'eux.
A la veille de l'arrivée de la flamme à San Francisco, la presse
locale ne rate pas l'occasion de prédire un désastre. Les autorités
se disent confiantes quant au bon déroulement de l'étape, rapporte
le San Francisco Chronicle, et n'écartent pas l'idée
que le parcours, qui a été ramené à un peu moins
de dix kilomètres, puisse être encore réduit. Des activistes
de l'ONG Students for a Free Tibet ont déjà mené une action
hautement symbolique sur le pont Golden Gate, lundi, et d'autres du même
type sont attendues. Seule étape en Amérique du Nord, San
Francisco attire des manifestants de tout le pays qui défendent des causes
très différentes
, explique le quotidien. Dans un éditorial
titré Eteignez la flamme avant que quelqu'un se brûle"
,
le journal affirme que les drapeaux hissés sur le pont symbolique de
la ville, à 46 mètres de hauteur, seront les manifestations
les plus sûres que vous verrez ici
, laissant entendre que des plus
dangereuses sont en vue.
LA FORCE ET LES MOTS DURS
La question qui se pose désormais, selon Time, est de savoir
si la flamme olympique va brûler la Chine
. La réaction
du Parti communiste chinois, en particulier, est attendue. Ils ont été
surpris, choqués par l'ampleur du ressentiment contre le pouvoir chinois (…).
Et c'est là que réside le mystère. Les leaders
chinois ne semblent pas être en mesure de répondre à ces
incidents sans donner dans la force et les mots durs
, explique l'hebdomadaire.
Il cite Perry Link, sinologue de l'université de Princeton, qui rappelle
que l'actuel président, Hu Jintao, est de cette génération
qui a reçu une éducation à la soviétique dans
les années 1950. Ils ne possèdent pas l'imagination pour prendre
des décisions plus sensées"
. Quant aux conséquences
que va avoir la présence de plus de 30 000 journalistes étrangers
en Chine, au mois d'août, il est encore trop tôt pour le dire, écrit Time.
Mais une chose est sûre, ils [ Pékin ] ne
s'imaginent toujours pas ce qui va leur tomber dessus
.
A plus longue échéance, The Guardian évoque déjà l'annulation du voyage olympique… en 2012. Le comité olympique londonien souhaite toujours organiser une tournée locale, mais ne voudrait pas risquer de répéter l'expérience catastrophique que vivent actuellement les Chinois.